The Vanishing Woman / Escamotage d’une femme

La production photographique et installative de Natascha Niederstrass est imprégnée des interrelations symboliques qu’elle décèle dans la culture visuelle et dans l’histoire. L’artiste crée des reconstitutions narratives de phénomènes qui auraient été marginalisés par les discours dominants, en vue de rétablir leur place dans nos perceptions du réel.

Avec The Vanishing Woman/Escamotage d’une femme, Niederstrass sonde les occurrences propres à la disparition du corps féminin dans les spectacles de magie du 19e siècle. Elle adopte une perspective critique par rapport à ce motif du passé en suggérant des parallèles avec le regard d’aujourd’hui porté sur les femmes. Ces trucages illusoires autrefois fréquents chez les magiciens – qui effaçaient la présence d’une femme sur scène en la recouvrant d’un textile ou d’un tapis – impliquent des considérations d’une forte teneur symbolique, voire politique. Pour Niederstrass, ce geste évoque l’invisibilisation d’une présence inopportune que l’on aurait cherché à écarter. L’artiste suggère même un rapport de correspondance iconographique avec une autre tendance de l’ère victorienne : celle des photographies aux mères cachées, des portraits d’enfants soutenus dans la pose par leur mère qui, elle, se dissimulait derrière des draps laissant néanmoins deviner sa silhouette.

Niederstrass présente une nouvelle série réalisée lors d’une résidence à VU. Dans une mise en scène aux accents lugubres, l’artiste allie photographie au sculptural dans diverses déclinaisons formelles faisant allusion aux scènes d’escamotage prisées par les magiciens. Fragmentaires et énigmatiques, les images ténébreuses suggèrent la présence de formes corporelles sous les plis du textile. Ces variations sur le motif invitent à réfléchir à l’insidieuse violence inhérente aux mécanismes d’invisibilisation et de déshumanisation du corps féminin.

Ce corpus fût présenté en codiffusion avec VU – Centre de diffusion et de production de la photographie, du 19 février au 24 avril 2022 dans le cadre de la Manif d’art 10 : La biennale de Québec. Sous le thème Les illusions sont réelles, le commissaire invité Steven Matijcio, directeur du Blaffer Art Museum de Houston au Texas questionne la relation entre l’art et ses mirages. Manif d’art 10 – La biennale de Québec est réalisée en collaboration avec le Musée national des beaux-arts du Québec. Il fût par la suite également diffusé du 19 novembre 2022 au 4 février 2023 à la Galerie Patrick Mikhail à Montréal.

Crédit photo : Charles-Frédéric Ouellet, Vincent Drouin et Marc-Antoine Hallé

Sans titre (Hommage à l’assistante de Bautier de Kolta) Tapis, chaise, voile, dispositif en acier, socle, 147 L x 148,5 H x 208 P cm (2022)
Sans titre (Dissimulée), Impression jet d’encre sur papier Hahnemühle, 81 x 109 cm (2021)
Série complète : Sans titre (disparition 1 à 7), Impression jet d’encre sur papier Hahnemühle, 122 x 91.5 cm (2021)
Sans titre (Lévitation d’une Dame), Hydrostone, fil transparent, carte à jouer, peinture latex noire, 38 L x 46 H x 38 P cm (2022)
Sans titre (L’envers de la pyramide), Impression jet d’encre sur papier Hahnemühle, 114 x 86 cm (2021)